10 October 2006

X-men 3: ENTRETIEN AVEC JOHN POWELL : L'EVOLUTION D'UN MUTANT

Cannes. Mai 2006. John Powell est l’invité du festival pour présenter ses deux dernières productions : X-MEN 3 : L’AFFRONTEMENT FINAL, l’ultime chapitre de la trilogie Marvel, et UNITED 93, un film poignant basé sur les événements du 11 septembre. Et Cinéfonia était là !
C’est dans une villa perchée sur les hauteurs cannoises que John Powell nous a cordialement reçus pour évoquer sa carrière et ses oeuvres.
A l’image d’un X-Men recueilli dans son manoir par le professeur Xavier, il a été accueilli par Hans Zimmer au sein de l’école Mediaventure pour participer au développement de musiques marquées par l’insertion d’éléments électroniques et de nombreux emprunts à la pop. Puis, tel Angel prenant son envol, il a construit son propre chemin, pour mieux développer maintenant vers une approche moderne et impressionnante de la musique de film classique, un symphonisme lyrique et puissant dont X-MEN 3 est sans doute l’expression la plus accomplie.
En attendant avec impatience la suite de cet entretien à l’occasion de la sortie de L’ÂGE DE GLACE 2 en dvd, ne boudons pas notre plaisir de découvrir les secrets d’une musique qui nous a fait l’effet d’une… Tornade !



20 YEARS AGO…

Monsieur Powell, on vous connaît avant tout pour avoir été un des piliers de Mediaventures, mais votre formation musicale est avant tout classique, dans la mesure où vous avez fait vos études au Trinity College
John POWELL) C’est une très bonne école, et il est vrai que j’ai bénéficié d’excellentes études classiques. Mais il se trouve que le Trinity College n’est pas aussi « classique » qu’on le pense. On m’a surtout appris à être créatif. Ils disposent d’excellents studios, d’une remarquable bibliothèque sonore, et de professeurs fantastiques ! On n’y développe pas cette vision étriquée de la musique que l’on peut trouver dans d’autres écoles. Leur sonothèque propose notamment une profusion d’enregistrements d’ethno-musicologie. Je me souviens y avoir passé des heures à écouter des musiques des quatre coins du monde. Ce n’est pas là que j’ai appris l’harmonie classique ou l’orchestration, mais bien plutôt la liberté de créer, en compagnie d’autres artistes, musiciens mais aussi danseurs et chorégraphes. Si j’avais été au Royal College of Music, cela aurait été tout autre. J’aurais fait mes classes à coup de basses chiffrées et de chants notés, et ma vie en aurait certainement été différente. C’est pourquoi je considère que cette ouverture d’esprit qui m’a été donnée a été fondamentale pour ma carrière.




Comment êtes-vous arrivé dans l’équipe de Mediaventures ?
JP) Après mes études, j’ai fait beaucoup de musiques de publicité chez Air-Edel, ainsi que pour une société parisienne appelée Vol de Nuit dirigée par un fantastique producteur, Claude Letessier. J’ai beaucoup aimé travailler avec lui, notamment parce qu’il tenait toujours les clients et les éditeurs loin de moi afin que je puisse travailler en toute sérénité. J’ai fait cela pendant plusieurs années et il est presque incroyable qu’après tout ce temps je n’ai pas encore appris le Français ! A cette époque, Hans (Zimmer) travaillait aussi pour Air-Edel, et c’est là que je l’ai rencontré. Il avait besoin d’aide sur une musique de film pour laquel il ne disposait que de dix jours. Il a donc appelé tous les bras disponibles à la rescousse. Quelques années plus tard, après avoir écrit mon opéra, AN ENGLISHMAN, IRISHMAN AND FRENCHMAN avec Gavin Greenaway, sur une mise en scène très multi-média de Michael Petry, je me suis dit qu’il était temps pour moi de bouger. J’ai donc pris une année sabbatique pour me rendre à Los Angeles. J’y ai loué un appartement au bord de la mer et je me suis mis à la recherche de projets. J’ai appelé Hans pour lui dire que j’étais en ville. Il ne m’a donné aucune garantie, mais il m’a contacté régulièrement pour faire de petites choses pour lui, de plus en plus nombreuses avec le temps. Puis est arrivé VOLTE FACE. Les studios le voulaient lui ; ils ne me connaissaient pas. Mais Hans leur a dit qu’il connaissait un jeune et qu’il se portait garant pour lui. Ils ont accepté et je leur ai présenté quelques démos : une vingtaine de minutes de musique composées à partir des images qu’ils m’avaient données, et ils ont aimé. Hans n’a jamais eu à rectifier mon travail sur ce film. Il venait aux réunions, me donnait quelques conseils, c’est tout. Et ce fut le début de notre collaboration à Mediaventures.



Après cette période, vous avez continué à travailler avec l’un de vos collègues de l’époque, Harry-Gregson-Williams.
JP) Tout a débuté grâce à Hans et à Jeffrey Katzenberg à partir du PRINCE D’EGYPTE. Harry aidait Hans sur la partition, et moi je l’aidais sur les chansons. Un jour, Jeffrey est venu voir Hans pour lui dire qu’il trouvait très intéressant notre travail à Harry et à moi et pour lui demander de choisir l’un d’entre nous pour FOURMIZ. Or Hans n’a pas pu. C’était comme si on demandait à un père de choisir entre ses deux fils. Alors Jeffrey s’est dit « Mettons-les donc ensemble et voyons ce que cela donne ». Nous ne nous connaissions pas. Nous travaillions dans la même entreprise quasiment sans nous être rencontrés. Nos débuts ensemble furent difficiles mais très intéressants. Et cela a tellement bien fonctionné que les films se sont enchaînés : CHICKEN RUN puis SHREK. C’est à ce moment que je me suis dit qu’il était temps pour moi de quitter Mediaventures pour trouver mon propre chemin, ma propre voix. J’ai gardé d’excellentes relations avec Hans mais, vous savez, il est toujours difficile de travailler dans l’ombre de quelqu’un. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il était difficile de travailler en binôme avec Harry, bien au contraire. Nous étions un peu comme dans un duo de compositeurs de chansons. Si une scène ne nous plaisait pas, on la passait à l’autre et inversement. Il nous arrivait parfois même de finir les morceaux de l’autre. Il n’en reste pas moins que la décision de nous séparer fut une décision commune et ni l’un ni l’autre n’avons eu à le regretter. Nous nous voyons d’ailleurs toujours.

A l’image de l’ « évolution » de Hans Zimmer (notamment sur le DA VINCI CODE) et de Harry Gregson-Williams avec LE MONDE DE NARNIA, il semblerait que vous vous orientiez maintenant vers une approche plus classique de la musique de film.
JP) Quand vous êtes dans ce business, une partie de vous-même doit se poser la question de savoir quel est le style du moment. Vous devez vous tenir au courant de ce qui marche et de ce qui ne marche. Quel compositeur travaille ? Quel compositeur ne travaille plus ? Et pourquoi ? Quand j’étais à Mediaventures c’était très simple : ils voulaient embaucher Hans, pas moi. Je devais donc leur offrir exactement ce qu’ils désiraient : une musique dans le style de Hans. Mais dans le même temps, j’ai essayé d’y apporter –avec parcimonie- ma touche personnelle, car je ne voulais pas n’être qu’un doublon de Hans. Maintenant, si vous regardez le paysage musical actuel, vous vous apercevez qu’on y retrouve toutes sortes de style. Mais le style dominant actuellement relève de la grande école de musique de film qui, elle-même, remonte à la musique classique. En me tournant délibérément vers ce style, j’ai voulu montrer que je n’étais plus le même, qu’il y avait une rupture entre mon travail à Mediaventures et mon style actuel. C’est déjà ce que j’avais commencé à faire sur THE BOURNE IDENTITY en essayant de produire une musique d’action actuelle avec des moyens autres que ceux de Mediaventures. L’idée est donc de répondre aux besoins stylistiques d’un film et d’une époque tout en trouvant son propre style.


BUILDING BRIDGES

Cet héritage classique se ressent tout particulièrement dans votre partition pour X-MEN 3 : L’AFFRONTEMENT FINAL. Comment êtes-vous arrivé sur ce projet, initialement prévu pour John Ottman ?
JP) Ce qui s’est passé, c’est que Brett Ratner travaillait initialement sur SUPERMAN RETURNS et Bryan Singer sur X-MEN 3 et qu’au bout du compte, chacun a fini sur le film commencé par l’autre. De fait, John Ottman a suivi Bryan Singer sur SUPERMAN RETURNS. En ce qui me concerne, je crois que Brett m’a choisi parce qu’il aimait beaucoup mes musiques pour THE BOURNE IDENTITY et THE BOURNE SUPREMACY. C’était des musiques très différentes de ce qui se pratique actuellement et je n’avais absolument pas prévu de me lancer dans une musique pour Superhéros. Pourtant, Brett m’a parlé de son scénario et j’ai aimé cette métaphore qu’est le traitement pour « guérir » les mutants. J’ai trouvé que cela renvoyait avec beaucoup de pertinence à la montée d’intolérance que l’on peut observer partout dans le monde et tout particulièrement aux Etats-Unis, où l’on trouve de plus en plus le rejet de la différence. On n’est jamais assez bien : trop grand, trop petit, trop ceci, trop cela. Musicalement parlant, c’était aussi pour moi un intéressant défi à relever à travers une partition plus explosive que tout ce que j’avais fait auparavant.

Quelle fut votre attitude par rapport aux musiques des deux précédents films ?
JP) Avant tout, je voudrais dire que toutes deux sont d’excellentes partitions très proches dans l’esprit mais très différentes en même temps. Quelque part, la musique de X-MEN 2 est une sorte de mutation de celle du premier. Pour X-MEN 3, j’ai tenu à rester dans la même famille, dans le même type de langage. Tout comme je l’ai fait pour l’AGE DE GLACE 2, vous ne pouvez faire abstraction d’un film original à succès. J’ai donc essayé de faire honneur aux deux premières partitions tout en y apportant un peu de moi-même, de ma sensibilité.

Vous parlez de fidélité à un style. Est-ce vraiment à celui des X-Men ou pensez-vous plus largement qu’il existe un langage musical propre aux Super-Héros, aux films Marvel.
JP) Mon premier devoir était envers les X-Men en particulier, mais force est de constater qu’il y a bien certains gestes musicaux communs à tous les Superhéros et qui ont été établis depuis très longtemps. Il y a les Héros, et il y a les Super-Héros. C’est un cran au-dessus et c’est cela qui m’a plu dans ce projet : faire quelque chose de démesuré, sans commune mesure avec ce qui a déjà été fait. Pour chaque scène, je devais penser « plus grand » que pour tous mes autres films.

Est-ce pour cette démesure que vous vous êtes lancé dans WATCHMEN?
JP) Pas exactement. Pour tout vous dire, je ne suis pas sûr que cela va se faire. Paul Greengrass, qui est le réalisateur de THE BOURNE SUPREMACY et de UNITED 93, a signé pour ce film il y a deux ans de cela. Il l'a développé et au moment de tourner, Paramount a complètement changé de management, ce qui fait que le projet a été stoppé et que nous sommes aujourd'hui dans l'incertitude. C'est dommage car c'était un excellent script, une histoire très sombre et très politique, une vision passionnante d'un futur possible. C'est pour cela que je pense que Paul était le réalisateur idéal. A aucun moment je n'ai songé au fait qu'il s'agit également d'une histoire de superhéros. C'est avant tout une métaphore. Mais rien ne dit que le film va se faire et que je vais finalement en faire partie…


PHOENIX RISES

Quels furent vos apports personnels à X-MEN 3 du point de vue thématique?
JP) Quand j'ai vu le film pour la première fois, il n'y avait aucune musique, ce qui fait que j'ai pu imaginer ce que je voulais sans contrainte, sans idée préconçue. L'importance du vaccin m'est tout de suite apparue, mais également le besoin d'un thème pour Magnéto, et d'un autre pour Jean Grey en tant que Phoenix. Ce qui m'a intéressé en elle, c’est aussi son histoire d'amour très particulière avec Wolverine. C'était l'occasion d'écrire un grand "love theme", très lyrique. Enfin, il me fallait un générique, un thème pour les X-Men en général. C'est sans doute ce dernier qui est le plus proche des deux premiers films et qui fait vraiment le lien avec eux. Mais cela ne m'a pas empêché d'y apporter ma touche personnelle, notamment dans l'utilisation que j'en fais dans The Funeral, en le passant du mode mineur au mode majeur.

Une indéniable réussite et assurément l'un de nos morceaux préférés…
JP) Et pourtant, vous avez bien failli ne pas en profiter! Remerciez pour cela Brett et le monteur du film, Mark. J'avais écrit un autre morceau qui ne les avait pas complètement convaincus. Le thème des X-Men était a priori trop héroïque ou trop… mineur. Je me suis donc mis au piano, j’ai passé ce thème en majeur et ce fut une révélation. Parfois on cherche à faire quelque chose de particulièrement élaboré, et finalement, sans trop savoir pourquoi, les cinéastes peuvent vous pousser dans la bonne direction, attirer votre attention sur quelque chose de plus simple que prévu, que vous aviez devant les yeux sans le voir, et qui s'avère être la meilleure solution!

Nous avons également été très impressionnés par Phoenix Rises, à la fois totalement chaotique et totalement contrôlé.
JP) Il faut savoir que, pour ce morceau, le sound designer m'a donné une maquette de tous les sons fantastiques qu'il a créés pour cette scène, toute la palette extraordinaire qu'il a imaginée pour cette séquence. A l'origine, je voulais utiliser le thème de Jean dans sa forme la plus passionnée et il me semblait que tous les effets sonores ne laissaient pas beaucoup d'espace pour le chaos. C'est la raison pour laquelle je me suis d'abord orienté vers une approche toute en staccatos très violents. Puis les choses ont évolué doucement et je me suis rendu compte que ces sons graves et autres souffles de tempêtes pouvaient finalement servir de base à la musique et je me suis mis à ajouter toutes sortes d’éléments supplémentaires. Du point de vue de l'orchestration, j'ai cherché à faire quelque chose de très puissant, quelque chose qui ne tournerait pas forcément autour des cordes. Je me suis souvent interrogé sur ce qui rendait les partitions de Jerry Goldsmith si impressionnantes et si puissantes. C'est à la suite de cela que j'ai donné le thème à l'ensemble de l'orchestre en gardant les basses à part. Plus généralement, je crois que la réussite de l'ensemble, c'est le jeu sur les contrastes. Le morceau ne se focalise pas sur un seul élément mais sur l'opposition et la complémentarité entre tous les éléments que je viens d'évoquer.


DIES IRAE, DIES ILLA

Les chœurs sont aussi très présents, encore plus sur l'album que dans le film.
JP) Tout à fait. Nous avons pris la décision de ne pas utiliser les mêmes chœurs dans l'album et dans le film afin de ne pas détourner l'attention du spectateur du drame qui se joue sur l'écran. C'est ainsi qu'il existe deux versions du même morceau : l'un avec des chœurs sans paroles, l'autre avec paroles, tirées de la messe de Requiem.

On se souvient d'ailleurs qu'X-MEN 2 commençait par une citation explicite du Dies Irae du REQUIEM de Wolfgang Amadeus Mozart.
JP) Ce texte est une source d'inspiration très ancienne mais aussi très puissante, très évocatrice. A tel point que c'est la raison pour laquelle je l'ai retiré du film. Il arrive qu'un morceau soit si prégnant que les spectateurs arrêtent de regarder le film pour ne se concentrer que sur la musique. Il y a bien des moments durant lesquels cela doit se produire, mais la plupart du temps il faut que la musique soit transparente. Cela ne veut pas dire qu'elle ne doit pas être intéressante, mais plutôt qu'elle ne doit pas prendre le pas sur l'histoire et sur l'image. C'est une question qui m'obsède : j'adore composer, et composer une musique qui puisse s'écouter en tant que telle. Mais dans le même temps, je suis au service du film.

Toujours dans Phoenix Rises, l'orchestre s'arrête soudain pour faire place au seul chœur au moment du sacrifice de Jean.
JP) A ce moment-là, tandis que les effets sonores fusaient de partout dans la bataille, nous assistons à une scène très intense, mais aussi très intime entre Jean et Wolverine. Les effets sonores sont atténués, comme à travers un filtre, et c'est ce que j'ai fait en musique en ne laissant passer que les chœurs. Cela me paraissait d'autant plus approprié que cela prolongeait de façon très significative l'idée de Requiem.

The Last Stand se poursuit avec le générique de fin et tandis que la quasi totalité de votre partition pour X-MEN 3 est très symphonique, dans la grande tradition de la musique de film, vous n'avez pu résister à un clin d'œil à Mediaventures pour la dernière occurrence du thème du Phoenix!
JP) C'était tout simplement pour moi une façon différente d'exposer le thème de Jean Grey. Il faut dire que je ne disposais que d'extrêmement peu de temps pour composer ce générique de fin de 7 minutes. J'ai donc écrit une version plus longue du générique d'ouverture, puis je suis revenu à mes toutes premières démos. Là, le thème de Jean avait une forme très proche de celle que vous évoquez. Je n'ai pas tant cherché à revenir au style Mediaventures qu'à lui donner une couleur "disque", dans le style de Massive Attack ou autre. Même si j'ai une formation classique, je ne nie pas que la rythmique peut être d'une grande utilité et d'une grande efficacité, d'autant plus quand on n’a que peu de temps pour écrire un morceau. Revenir à cette première version fut un geste spontané, comme évident pour moi. Mais elle ne figure jamais telle quelle dans le film.

Si vous pouviez avoir un super-pouvoir, quel serait-il?
JP) Une partie de moi aimerait avoir le pouvoir d'aller sur les lieux de conflits du globe et d'apporter la paix, et une autre partie aimerait pouvoir faire craquer toutes les filles. C'est comme si l'adulte en moi ne pouvait se dépêtrer de l'adolescent crétin qu'il a été! Plus sérieusement, je pense que ce n'est pas la peine de désirer avoir des super-pouvoirs car ces pouvoirs sont en nous. Si nous avons vraiment le désir de réaliser certaines choses, nous le pouvons d'une manière ou d'une autre.


THE LAST STAND

X-MEN 3 vient d'être présenté à Cannes. Comment se passe votre séjour dans la capitale française du cinéma?
JP) Je ne suis pas un grand amateur de ce genre de réunion, de cette agitation, de cette folie. Je suis surtout venu au Festival pour présenter mes deux derniers films, X-MEN 3, mais aussi UNITED 93, de Paul Greengrass.

Pouvez-vous nous parler de ce film difficile, et du rôle primordial qu'y tient la musique?
JP) C'est l'histoire du quatrième avion qui s'est crashé le 11 septembre. Ce crash s'est déroulé après les trois premiers, sur le World Trade Center et sur le Pentagone. Quand le détournement a commencé, les passagers ont eu le temps de téléphoner à leur famille, et ils ont su ainsi ce qui était en train de se passer. Et même si les pirates leur disaient qu'il ne s'agissait que d'un « simple » détournement, ils savaient qu'il n'en était rien et qu'un sort bien plus terrible encore les attendait. Paul a choisi d'aborder ce film de façon très réaliste, ce qui le rend assez difficile à regarder. On sait tous comment cette histoire s'est finie et elle pose la question du choix : fallait-il rester assis ou fallait-il combattre? Dans les deux cas, il s'agit d'une mauvaise solution. Une seule chose est certaine : la violence engendre toujours la violence. C'est un film aux vertus cathartiques, mais également très troublant. De ce fait, mon rôle a été d'essayer d'apporter un peu de réconfort aux spectateurs, de leur tenir la main en quelque sorte à travers la musique. C'est l'antithèse d'X-MEN 3 : ce sont des gens simples pris dans quelque chose qui les dépasse, qui a dépassé tout le monde, des militaires aux politiques. J'étais moi aussi dépassé par ce film et sa portée, et j'en ai beaucoup discuté avec Paul. Il m'a conseillé de voir THE BATTLE OF ALGIERS, l'un de ses films préférés, mis en musique par Ennio Morricone et cela m'a beaucoup aidé à voir comment je pouvais aider le film. Il ne fallait pas apporter de tension ni d'émotion car tout était déjà dans l'histoire. J'ai donc adopté une attitude plus douce et plus subtile, consolante.

Quels sont vos modèles dans le monde du cinéma?
JP) Je dirai que, pour moi, le meilleur compositeur était Stanley Kubrick, car il a su donner un sens inédit à la musique, et que le meilleur metteur en scène est John Williams, car plus que tout autre, il a le génie de pouvoir vraiment raconter une histoire par sa musique.

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